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« Quoi? Notre pensée influe la réalité? Euh c’est l’inverse non? »

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L’idée fait sourire. L’effet Placebo est un peu plus ancré dans les mœurs et pourtant il part du même principe.

Le fait de croire – consciemment ou inconsciemment- au potentiel guérisseur d’un médicament peut rendre réelle cette guérison alors qu’il s’agit seulement d’une pastille neutre.

En d’autres termes, le changement voulu (ici la disparition du symptôme) n’est pas déclenché par l’élément extérieur mais par notre positionnement intérieur vis-à-vis de cet élément extérieur.

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« Oui mais bon, est-ce que ça veut dire pour autant que nos pensées font la réalité? Est-ce que par exemple nos attentes vis-à-vis de quelqu’un, en positif ou en négatif, ont vraiment un effet sur leur comportement ? « 

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Dans les années 60, en Californie, Robert Rosenthal et Lenore Jacobson se rendent dans une école élémentaire avec pour objectif affiché d’étudier le QI des élèves. Ils leur font donc passer des tests d’intelligence.

Les chercheurs expriment ensuite aux professeurs qu’une proportion de 20 % d’entre eux ont des capacités de réussite académique fort prometteuses, en leur transmettant la liste des noms concernés.

8 mois plus tard, ces mêmes élèves sont re-testés, verdict: ils obtiennent des scores plus élevés qu’au premier test.

Sauf qu’en réalité s’ils étaient sur la liste 8 mois plus tôt, ce n’est pas pour leur score mais parce qu’ils ont été désignés… au hasard.

CQFD! Les chercheurs avaient en effet un tout autre objectif expérimental.

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Ce qu’ils ont démontré est maintenant connu sous le nom d’effet Rosenthal ou effet Pygmalion: l’idée selon laquelle ce qu’on pense de quelqu’un, en positif ou en négatif, va de fil en aiguille impacter son comportement- faisant donc miroiter qu’on a raison de penser ce que l’on pense de lui/elle.

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Mais comment? Il s’avère que pour l’expérience en question les professeurs se sont montrés plus attentifs envers les enfants qu’ils pensaient doués, avec des attentes mine de rien plus élevées et positives, donc une posture pédagogique différente.

Les enfants, en retour, se sont sentis valorisés , encouragés: dans le regard de l’adulte ils voyaient qu’ils étaient capable de réussir et leur comportement scolaire s’en est tout naturellement suivi, avec des actions dirigées dans ce sens.

Ce qui sous-tend que consciemment ou inconsciemment, le fait de percevoir que l’autre nous juge de telle ou telle manière nous fait agir en conséquence.

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Est-ce si étonnant que ça finalement? Ça dépend pour qui.

Quoi qu’il en soit, l’effet Pygmalion implique la nécessité de développer une vigilance du moins une conscience au sujet des croyances que l’on projette sur l’autre car elles ont bel et bien une influence sous-jacente mais réelle. Et nos croyances sur nous-mêmes aussi.

« Ah bon donc c’est aussi simple que ça? » Non bien sûr! Déjà, sonder et transformer ses croyances est souvent une sacrée paire de manches (conditionnements tenaces et nombreux, émotions cristallisées, nœuds relationnels, la plupart inconscients).

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En tout cas, la question a toute sa pertinence dans le domaine de l’éducation: A quel point nos croyances d’adultes ont un pouvoir d’influence sur le ressenti et le comportement de l’enfant?

S’il se sent jugé comme fainéant, cela ne va sûrement pas l’aider à faire preuve d’une grande appétence à la tâche scolaire (ou autre)… S’il sent qu’on croit en ses capacités de réussir, et/ou s’il y croit lui-même, c’est déjà un premier ingrédient de coché.

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MAIS gare aux raccourcis !! Complimenter à gogo peut avoir des effets tout aussi stériles voire néfastes, le receveur pouvant se sentir étouffé par tant de louanges et non reconnu pour ce qu’il est simplement.

Il ne s’agit pas de se transformer en bisounours. Ni de se culpabiliser.

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D’ailleurs, on est bien d’accord que l’effet Pygmalion est un paramètre parmi d’autres dans une réalité multi-factorielle vaste et complexe.

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Ceci étant dit….

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« When we expect certain behaviors of others, we are likely to act in ways that make the expected behaviour more likely to occur. »
(Rosenthal, 1985)

(Source)


« Quand on s’attend à certains comportements de la part des autres, nous sommes enclins à agir de façon à ce que le comportement attendu soit plus susceptible d’arriver. »

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A méditer !

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Crédit photo: Florent Ruch